AVIGNON 2025

O.R.N.A : l’assistante qui pose les vraies questions

today21 mai 2025 77 4

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À qui obéit Orna ?

Avec ORNA, la compagnie Les Bicéphales signe une fable rétro-futuriste troublante, entre théâtre, musique, vidéo et réflexion vertigineuse sur les limites de l’intelligence artificielle. Un spectacle à découvrir au Festival d’Avignon 2025, du 5 au 26 juillet à 13h05, au Théâtre La Luna.

Dans un décor rétro-futuriste qui évoque aussi bien un appartement vieillot qu’un laboratoire poétique, Monsieur, un vieil érudit en perte d’autonomie, tente de résister à l’ennui, à la solitude, à l’effacement. Entre les visites de sa petite-fille et la compagnie bavarde de sa télévision, ses jours s’étirent… jusqu’à l’arrivée d’Orna, une assistante de vie d’un genre nouveau. Docile, élégante, fascinante et non humaine.

Orna est un robot. Mais un robot presque trop humain. Au fil des jours, elle devient pour Monsieur bien plus qu’un soutien : un dernier lien avec le monde, une présence attentive, presque une confidente. Jusqu’au moment où l’homme lui demande l’impossible. À ce carrefour, une question majeure se pose : à qui Orna doit-elle obéir ? À la volonté de Monsieur, ou aux lois de la robotique ?

La mise en scène d’Anne Cardona épouse la finesse du propos : tout ici est tissé avec minutie. Le jeu tout en fragilité de Nicolas Moreau, la présence mystérieuse de Laura Marin, et les interventions d’Anne Cardona elle-même créent un triangle humain-machine bouleversant. Les vidéos de Katell Paugam et les lumières signées Guillaume Rouchet construisent un espace visuel d’une grande richesse, où se superposent réalité, mémoire et interface numérique. Le sound design de Laurent David et les compositions de Bertrand Louis ajoutent à cette immersion sensorielle, tandis que la chorégraphie de Sophie Pajot donne au personnage d’Orna une gestuelle dérangeante, presque hypnotique.

À la sortie de la salle, une certitude : ORNA laisse des traces. Par son esthétique soignée, par la densité de son jeu, et surtout par les questions qu’il soulève. Jusqu’où irons-nous pour déléguer nos soins, nos liens, nos décisions ? À partir de quand une machine cesse-t-elle d’être un outil pour devenir un sujet ?

Avec ORNA, Les Bicéphales proposent un théâtre sensible et profondément contemporain, qui place l’humain face à ses propres choix. Et s’il fallait une preuve que la science-fiction a toute sa place sur scène, la voici.

Écrit par: SPEED

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